Avec Rudik, l’autre Noureev, Philippe Grimbert signe un livre sobre et intriguant, où il invente la relation particulière qui se crée entre le grand danseur russe et son fictif psychanalyste, Tristan Feller. Ce dernier, qui en de nombreux points rappelle le romancier lui-même, ne peut résister à la tentation d’entrer dans le monde fascinant de l’artiste capricieux. Il déroge plus d’une fois aux règles qu’un analyste doit pourtant respecter pour mener à bien sa mission : aider son patient. Noureev utilise souvent un intermédiaire pour gérer ses rendez-vous, il se montre colérique quand il s’agit de payer, il insiste pour que Tristan vienne le voir danser, et l’emmène même en tournée. Le docteur Feller résiste bien mollement. Il ne parvient pas à voir l’homme en face de lui, il est émerveillé par la légende.
danse
Blanche Neige, un ballet inspiré
Angelin Preljocaj a voulu, de son propre aveu, créer un « ballet romantique contemporain ». Il choisit d’adapter le conte Blanche Neige, et livre un ballet sublimé par la musique de Gustav Mahler. Les moments de grâce sont pluriels, mais avant de les évoquer, sans doute faut-il souligner les éléments négatifs de cette oeuvre inégale. Si Jean Paul Gaultier a sans doute du talent, ce n’est pas celui d’être sobre. Les costumes, souvent décrits comme somptueux dans les critiques du spectacle, sont surtout d’un mauvais goût surprenant, voire même d’une vulgarité peu commune. Ainsi, la méchante reine est-elle affublée d’une création qui rappelle davantage une souveraine sadomasochiste qu’une sorcière de conte de fées. Les talons, la cape, la coiffe, tout cela empêche la danseuse de se mouvoir, et ses apparitions s’accompagnent bientôt des soupirs du public ; elle se trémousse plus qu’elle ne danse, elle fait de la figuration bien plus qu’elle n’incarne le monstre. Ses fidèles serviteurs apparaissent vêtus en félins, et si leurs costumes leur permettent au moins une grande liberté de mouvements, ils n’en restent pas moins ridicules lorsqu’ils se roulent au pied de leur maîtresse. Ce spectacle soi-disant « familial » a quand même des faux airs de cabaret érotique.
Danser, maintenant
Au théâtre national de Chaillot, Carolyn Carlson a proposé sa nouvelle création, la chorégraphie Now. Le spectacle se veut résolument actuel, il s’inscrit dans un besoin de s’arrêter, de se concentrer sur le présent dans un monde qui semble aller toujours de plus en plus vite. La danseuse et chorégraphe avoue s’être inspiré de La poétique de l’espace de Gaston Bachelard, mais aussi de certaines théories bouddhistes.