Le spleen de Tchekhov

thierry depagne ivanov 1© Thierry Depagne

« Je ne comprends pas, je ne comprends pas, je ne comprends pas ! C’est à se tirer une balle !… » Ivanov, héros de la pièce éponyme de Tchekhov, écrite en 1887 alors qu’il avait 27 ans, est un antihéros désabusé et mélancolique. Il semble porter sur ses épaules la misère du monde, mais ce poids ne lui inspire plus qu’un profond ennui et un dégoût incommensurable de lui-même. La tristesse s’est tarie, les larmes ont séché, et il ne reste plus qu’un vide immense. Cet état provoque chez le personnage une incompréhension totale. Pourquoi ? Hamlet est, à plusieurs reprises, mentionné dans la pièce. Mais Ivanov ne se demande plus s’il faut vivre ou non, s’il faut agir ou pas. Il n’en est plus là. Pour lui, tout est déjà fini. Il n’y a plus rien à faire. Il se traîne encore un peu, sans vraiment savoir pourquoi. Oui, pourquoi cette infinie fatigue, pourquoi ces gens autour de lui, pourquoi la vie finalement. Il erre un peu comme un fantôme, avec pour seule arme contre le monde son cynisme. Une fois que le rire grinçant cessera lui aussi, Ivanov sera conduit à la mort, celle qu’il évoque déjà dans son monologue au début de la scène quatre de l’acte III. « C’est à se tirer une balle ! »

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